Les marges des entreprises françaises, malgré un niveau assez bas, contribuent à l’inflation à hauteur de 50%

12/06/2023
Dans un contexte d’inflation élevée, de perturbations des échanges commerciaux, de renforcement du risque d’impayés et de resserrement des taux, comment se comportent les marges des entreprises européennes ? Quel bilan pour 2022 et quelles perspectives pour 2023 ? Quels pays et quels secteurs tirent le mieux leur épingle du jeu ? C’est le sujet abordé par les experts Allianz Trade dans leur dernière étude.

Au sommaire :

  • A fin 2022, en zone euro, les marges des entreprises non-financières ont atteint 40,8%, soit +0,6 point par rapport à leur moyenne de long-terme. L’Italie (43,1%), l’Espagne (42,2%) et l’Allemagne (39,3%) enregistrent les meilleures performances, loin devant la France (32,3%). Ces taux de marge élevés masquent toutefois une réalité moins réjouissante. « Le niveau élevé des taux de marge constaté à fin 2022 tient surtout à 2 secteurs qui détiennent un fort pouvoir de fixation des prix : les services de transport et l’énergie. En les excluant, on se rend compte que le taux de marge des entreprises non-financières en zone euro est finalement plus faible. Par exemple, en France, au T1 2023, le taux de marge des entreprises non-financières hors transports et énergie est resté déprimé, toujours à son plus bas niveau depuis les années 1980 (28,6%) », explique Maxime Darmet, économiste France chez Allianz Trade.
  • En France, malgré un niveau assez bas, les marges des entreprises sont devenues un moteur important de l’inflation depuis mi-2022. « Selon nos calculs, les marges des entreprises ont contribué à l’inflation française à hauteur de 2,8 points au T1 2021, soit environ 50% de l’inflation constatée (6%). Même si les marges françaises restent globalement plus faibles que celles des autres pays européens, leur contribution à l’inflation est croissante. En d’autres termes, l’inflation en France trouve de plus en plus sa source dans la génération de profit par les entreprises, et plus particulièrement celles des secteurs manufacturier (y compris industrie agro-alimentaire) et de l’énergie », ajoute Maxime Darmet.
  • Si l’on se penche sur l’aspect sectoriel, en zone euro, les marges des entreprises des secteurs des services restent bien en-dessous de leur niveau d’avant-crise (37% à fin 2022 contre 39% à fin 2019). Une fois encore, la France est en retrait par rapport à ses voisins (28% à fin 2022), loin derrière l’Italie par exemple (45%). « Les entreprises françaises du secteur des services, malgré une demande plutôt résiliente, subissent une forte concurrence, des hausses de salaires rapides et une croissance négative de leur productivité depuis la pandémie. Ces effets combinés compressent leurs marges », justifie Maxime Darmet.
  • Dans le secteur de la construction, les entreprises allemandes sont les mieux positionnées en matière de profitabilité. Ces dernières ont su bénéficier de la tendance générale à la hausse des prix pour accroître significativement leurs marges (53% à fin 2022). Une performance largement supérieure à celle des entreprises françaises (36%).
  • Qu’attendre pour 2023 ? Le pic de profitabilité pourrait bien être passé pour les entreprises non-financières européennes. Selon Allianz Trade, leur taux de marge moyen devrait s’établir aux alentours de 38% fin 2023, en-dessous des niveaux pré-Covid et en recul de -3 points par rapport à 2022. En cause, un pricing power plus limité et la hausse des coûts de financement. La baisse des marges devraient être plus forte en Espagne et en Italie, suivie par la France. En effet, dans ces deux premiers pays, la transmission de la politique monétaire restrictive devrait être plus rapide. « Même si le prix des matières premières décélère et les chaînes d’approvisionnement se normalisent, les salaires devraient croître fortement au moins jusque début 2024 et la demande rester faible avec la transmission de la politique monétaire restrictive qui se poursuit. La persistance d’une faible demande et l’accroissement des stocks va de plus en plus limiter le pouvoir de fixation des prix des entreprises. Cela aura un impact négatif sur les marges des entreprises », détaille Ana Boata, Directrice de la recherche économique d’Allianz Trade.

Vous voulez en savoir plus sur nos analyses et prévisions, pays par pays et secteur par secteur ? Téléchargez l'étude dans son intégralité !