Malgré les perturbations des chaînes d’approvisionnement, le commerce mondial devrait croître de +5,4% en 2022

09/12/2021
Selon Euler Hermes, les perturbations des chaînes d’approvisionnement à l’international devraient rester fortes jusqu’au S2 2022. En cause, le rebond de l’épidémie Covid-19 dans le monde entier, l’intense politique zéro-Covid maintenue par la Chine et la volatilité de la demande et de l’approvisionnement pendant la période du Nouvel An chinois. Toutefois, le leader mondial de l’assurance-crédit estime que la croissance du commerce mondial restera solide en 2022 et 2023, avec de clairs gagnants à l’échelle sectorielle et régionale.
  • Selon Euler Hermes, les perturbations actuelles des chaînes d’approvisionnement dureront jusqu’au S2 2022.
  • L’Europe est plus exposée que les Etats-Unis aux pénuries de biens intermédiaires en provenance de Chine.
  • Euler Hermes estime que le commerce mondial de biens en volume croîtra de +5,4% en 2022 et de +4% en 2023 (après +8,3% en 2021).
  • Les exportations françaises devraient croître de +4,6% en 2022 et de +1,8% en 2023, avec une demande additionnelle adressée aux exportateurs français de +45 Mds EUR en 2022 et de +25 Mds EUR en 2023.

D’intenses perturbations des chaînes de valeur jusqu’au S2 2022

Après des performances exceptionnellement fortes depuis le S2 2020, le commerce mondial de biens s’est contracté au T3 2021. Comment l’expliquer ? Les économies avancées souffrent plus des goulots d’étranglements en matière d’approvisionnement que des difficultés liées à la demande : selon Euler Hermes, 75% de la contraction actuelle des échanges commerciaux internationaux en volume est due à l’incapacité des entreprises à produire faute d’intrants et de matières premières, et 25% sont attribués aux délais rallongés de transport.

Les perspectives concernant le transport de marchandises devraient d’ailleurs prochainement s’améliorer : les nouvelles capacités de transports maritimes commandées par les acteurs du secteur devraient être opérationnelles vers fin 2022, et la hausse des dépenses américaines en infrastructures portuaires devrait aider à fluidifier le trafic maritime.

L’Europe particulièrement exposée aux pénuries d’intrants en provenance de Chine

En matière de dépendance aux biens intermédiaires importés, l’Europe est plus exposée que les Etats-Unis. Sans augmentation des capacités de production ni investissement dans les infrastructures portuaires, la normalisation des perturbations affectant les chaînes d’approvisionnement pourrait ainsi prendre plus de temps en Europe, et ne survenir qu’après 2022, surtout si la demande continue de tourner à un niveau plus élevé que son niveau potentiel. Selon Euler Hermes, en Europe, les secteurs les plus exposés aux pénuries d’intrants sont les équipements ménagers, l’électronique, l’automobile et les machines et équipements.

« La Chine est un facteur de risque important pour l’Europe : nous estimons qu’une baisse de -10% des importations européennes en provenance de Chine entrainerait un recul de l’activité de -6% pour le secteur de la métallurgie, de plus de -3% pour l’automobile (incluant les équipements de transport) et de plus de -1% pour les ordinateurs et l’électronique », détaille Ano Kuhanathan, Conseiller sectoriel senior chez Euler Hermes.

Le reshoring et le nearshoring font partie des débats, mais restent encore peu appliqués

Malgré les perturbations actuelles des chaînes d’approvisionnement dans le monde entier, Euler Hermes ne constate pas de tendance claire au reshoring (relocalisation) ou au nearshoring (délocalisation de proximité). La seule exception est celle du Royaume-Uni, qui a dû faire face à des perturbations relatives au Brexit.

Toutefois, le protectionnisme a atteint un niveau record en 2021. Euler Hermes estime qu’il se maintiendra à un niveau élevé en 2022, principalement sous la forme de barrières commerciales non-tarifaires (subventions, politiques industrielles, etc.).

Le commerce mondial devrait croître de +5,4% en 2022 et de +4% en 2023

Même s’il est possible que la contraction du commerce mondial se poursuive au T1 2022, Euler Hermes prévoit une normalisation des échanges internationaux de biens dès le S2 2022, soutenue par trois facteurs :

  1. Un ralentissement des dépenses des ménages en matière de biens durables, du fait de leur long cycle de remplacement et d’une évolution vers des comportements de consommation plus durables ;
  2. Des pénuries d’intrants moins fortes, car les stocks des entreprises sont revenus, et parfois même excèdent, leurs niveaux d’avant-crise dans la plupart des secteurs, avec un CAPEX en hausse (surtout aux Etats-Unis) ;
  3. Une congestion moindre du fret maritime, comme expliqué précédemment ;

« Pour l’ensemble de ces raisons, nous estimons que la croissance du commerce international atteindra +5,4% en 2022 et +4% en 2023 (après +8,3% en 2021), puis retournera ensuite progressivement à son niveau d’avant-crise. Toutefois, cette croissance soutenue risque de se faire au prix de déséquilibres grandissants à l’échelle mondiale. Les Etats-Unis devraient enregistrer un déficit commercial record en 2022-2023 (-1 300 Mds USD), au contraire de la Chine qui verra son excédent commercial atteindre en moyenne +760 Mds USD. Dans le même temps, la zone euro pourrait également enregistrer un excédent commercial supérieur à sa moyenne des dernières années, de l’ordre de +330 Mds USD », explique Françoise Huang, économiste en charge de l’Asie-Pacifique chez Euler Hermes.

Selon Euler Hermes, l’énergie, l’électronique et les machines et équipements sont les secteurs qui profiteront le plus de la croissance du commerce mondial lors des deux prochaines années. En 2023 toutefois, c’est l’automobile qui tirera son épingle du jeu. A l’échelle régionale, l’Asie-Pacifique continuera d’enregistrer les plus importants gains à l’export dans les années à venir, avec plus de +3 000 Mds EUR en cumulé sur 2021-2023.

La France relativement préservée des perturbations des chaînes d’approvisionnement

Grâce à l’orientation de son appareil exportateur, plus tourné vers les services que vers l’industrie, la France reste relativement préservée des perturbations actuelles des chaînes d’approvisionnement à l’échelle mondiale. Ainsi, selon Euler Hermes, les exportations françaises devraient croître de +7,8% en 2021, avec une demande adressée aux exportateurs français de +60 Mds EUR (-130 Mds EUR en 2020).

En 2022 et 2023, dans un contexte de normalisation des échanges internationaux de biens, les exportations françaises devraient encore croître (+4,6% et +1,8% respectivement). La demande additionnelle adressée à la France s’élèvera à +45 Mds EUR en 2022 et +25 Mds EUR en 2023. Le manque à gagner à l’export relatif à la crise Covid-19 sera ainsi comblé d’ici 2 ans.

Dès l’année prochaine, les exportateurs français auront donc de belles opportunités à saisir, et plus particulièrement pour les secteurs des équipements de transports (+3 Mds EUR d’exportations additionnelles à saisir en 2022), pharmaceutique (+2,9 Mds EUR), de la chimie (+2,5 Mds EUR), de l’électronique (+2,3 Mds EUR) et des machines et équipements (+2 Mds EUR).

Parmi les marchés les plus porteurs pour les entreprises françaises en 2022, on retrouve l’Allemagne (+5,8 Mds EUR d’exportations additionnelles à saisir), les Etats-Unis (+4 Mds EUR), le Royaume-Uni (+3,7 Mds EUR), la Belgique (+3,2 Mds EUR) et l’Espagne (+2,9 Mds EUR).