Une guerre commerciale ? Pas vraiment, tout du moins pas encore…

Le 30 novembre et le 1er décembre 2018, à Buenos Aires, les leaders du monde se réuniront à nouveau. Le commerce fait figure de sujet numéro un sur l’agenda officiel, tant les tensions grandissantes qui opposent les Etats-Unis et la Chine sur le sujet pourraient mettre l’économie mondiale en péril.

  • Le sommet du G20 débute demain à Buenos Aires sur fond d’inquiétudes relatives au protectionnisme américain. Malgré tout, le commerce mondial de biens et services est resté relativement résilient en 2018 (+3,8%).

  • En 2019, un léger ralentissement de la croissance du commerce mondial est attendu (+3,6%), en ligne avec le ralentissement de la croissance économique mondiale. En cause, le resserrement des conditions financières et les incertitudes qui planent sur le commerce.

  • Au-delà du protectionnisme, les entreprises doivent se préparer à affronter une hausse du coût du commerce, une réorientation des échanges et un renforcement du risque politique.


Une décélération de la croissance du commerce mondial attendue en 2019

Selon Euler Hermes, le commerce mondial de biens et services est resté relativement résilient cette année, avec une croissance de +3,8% en volume, malgré la résurgence du protectionnisme américain. Le volume de marchandises échangées continue de croître à un niveau supérieur à la moyenne de 2012-2016, soutenu par une solide croissance de la demande mondiale.

En 2019, le leader mondial de l’assurance-crédit estime que la croissance du commerce mondial devrait ralentir, en ligne avec la croissance économique mondiale. En volume, les échanges internationaux de biens et services devraient décélérer et croître de +3,6% (+3,8% en 2018). En valeur, un ralentissement est également attendu avec une croissance de +6,3% (+7,2% en 2018). En d’autres termes, les échanges internationaux devraient croître de +1 300 Mds USD en 2019, après +1 700 Mds USD en 2018.

Ces prévisions économiques sont basées sur trois hypothèses estimées par Euler Hermes :

  • La croissance économique mondiale devrait légèrement ralentir en 2019 (+3,1% contre +3,2% en 2018).

  • Un resserrement de la politique monétaire américaine est attendu, ce qui devrait engendrer un ralentissement de la croissance de l’investissement et moins de dynamisme économique, en particulier chez les émergents.

  • Le cours du pétrole devrait baisser à 69 USD le baril en 2019 en moyenne, mais la résilience des devises et l’inflation plus forte soutiendront la croissance du commerce mondial en valeur.

La guerre commerciale a-t-elle été déclarée ? Pas vraiment…

Jusqu’ici, le protectionnisme a eu un impact très limité. Mais le moral des entreprises, comme indiqué par le déclin de l’indice PMI des grandes économies, a été affecté par les menaces qui pèsent sur le commerce.

Certes, les annonces du 23 septembre du Président Trump ont entrainé une hausse des taxes américaines à l’import de +1,7 point, ces dernières atteignant désormais 5,2% en moyenne (soit le même niveau que dans les années 1980). Mais pour autant, le protectionnisme devrait rester sous contrôle à l’échelle mondiale.

En effet, Euler Hermes voit trois raisons pour lesquelles la guerre commerciale devrait être évitée : le pragmatisme américain, le filet de sécurité commercial chinois, et la lassitude protectionniste. Le leader mondial de l’assurance-crédit table sur une approche commerciale plus constructive de la part des Etats-Unis, et estime que les représailles chinoises envers les Etats-Unis ne mettent pas en péril le commerce mondial.

« Les réformes facilitant le commerce et les récents accords de libre-échange compensent partiellement la querelle qui oppose la Chine et les Etats-Unis. De plus, à l’exception des Etats-Unis, la plupart des pays favorisent aujourd’hui les mesures de libre-échange. La dernière édition du classement Doing Business de la Banque Mondiale montre d’ailleurs une tendance positive : le commerce transfrontalier a progressé dans la plupart des grandes économies, et particulièrement dans les marchés émergents », développe Wilfried Verstraete, Président du Directoire d’Euler Hermes.

Toutefois, si la situation s’envenimait et que les taxes américaines à l’import atteignaient 6% en moyenne, cela coûterait 0,5 point de croissance aux Etats-Unis. Et si une guerre commerciale venait à éclater, avec un passage des taxes américaines à 12% en moyenne, cela coûterait 2 points de croissance aux Etats-Unis et plongerait l’économie mondiale dans la récession.

Nouvelles menaces en vue : coût du commerce, réorientation des échanges et risque politique

Au-delà du protectionnisme, les entreprises doivent se préparer à affronter une hausse du coût du commerce, une réorientation des échanges et un renforcement du risque politique.

Premièrement, le déficit de financement du commerce (1 500 Mds USD) va s’accroître du fait du resserrement des conditions financières en dollars et du renforcement des risques de change, d’impayés et politique. Ensuite, la réorientation des échanges va créer des gagnants et des perdants : les plateformes commerciales asiatiques devraient être les principaux bénéficiaires. Enfin, Euler Hermes estime que moins de nouvelles mesures protectionnistes ont été prises en 2018 qu’en 2017 (400 contre 560), mais que les risques de confiscation et d’expropriation pourraient s’accroître au regard du ralentissement de l’économie mondiale.

Et la France dans tout ça ? Une troisième année consécutive de croissance des exportations !

En 2019, les exportations françaises de biens devraient croître de +20 Mds EUR, soit une troisième année consécutive de croissance. Les pays européens cristallisent la plupart de cette demande additionnelle adressée à la France (environ 50%), mais l’Asie se présente également comme une terre de débouchés pour les exportateurs tricolores (+1,2 Mds EUR de débouchés à saisir en Chine en 2019).

Les entreprises françaises sont conscientes des opportunités qui existent à l’international, en témoigne les résultats du dernier baromètre export Euler Hermes (2018) : 84% des entreprises françaises affirment vouloir augmenter leur chiffre d’affaires à l’export (+5 points vs 2016), et 72% privilégient l’export à l’implantation locale (+8 points vs 2016).