Quels pays seraient les plus affectés économiquement par une résurgence du risque social ?

05/06/2020

Chaque trimestre, Euler Hermes évalue l’évolution du risque pays. Afin d’en avoir une vision plus précise et complète, le leader mondial de l’assurance-crédit a ajouté cette année à son analyse les risques environnementaux, sociétaux et de gouvernance (ESG). Une décision qui prend tout son sens au regard de la période que traverse actuellement le monde. En effet, en mettant à l’arrêt des pans entiers de l’économie internationale, l’épidémie Covid-19 a eu un impact négatif majeur sur les agents économiques du monde entier. Les préoccupations de ces derniers quant à la reprise sont grandissantes, et laissent entrevoir une possible résurgence du risque social qui pourrait affecter le climat des affaires dans de nombreux pays.

Dans ce contexte, Euler Hermes et Allianz présentent leur Indice de Risque Social (IRS). Cet indicateur reflète la vulnérabilité structurelle des pays aux risques sociaux. L’IRS évalue l’impact d’une résurgence potentielle du risque social dans un pays sur la stabilité politique et économique de celui-ci.

L’IRS est établi sur une échelle allant de 0 (risque social fort) à 100 (risque social faible), et est défini grâce à 12 sous-indicateurs, dont notamment la croissance du PIB réel par habitant, la part de la population active dans la population en âge de travailler, les inégalités de revenus, les dépenses publiques sociales ou encore la confiance de la population envers le gouvernement en place. Au total, Euler Hermes a calculé l’IRS de 102 pays pour l’année 2020.

Faible vulnérabilité dans les économies avancées, hétérogénéité chez les émergents

Sans surprise, toutes les économies avancées font partie des 35 pays les moins vulnérables au risque social. Le Danemark occupe la première place du classement avec un score IRS de 82,5, devant la Finlande (81,3) et la Suède (78,1). L’Allemagne (76,5), occupe la 5ème place du classement, devancée par l’Autriche (76,9). Parmi les plus mauvais élèves de ce groupe de pays, on retrouve l’Italie (30ème – 63,9) et la Grèce (35ème – 61,4).

Chez les émergents, la situation est plus hétérogène. En Europe émergente, l’impact d’une résurgence du risque social sur le climat des affaires semble modéré, avec 12 pays sur 18 ayant un score IRS supérieur à 50, dont 9 avec un score supérieur à 60, comme l’Estonie par exemple (69,6). Le risque est plus significatif en Asie émergente, avec 7 pays sur 14 ayant un score IRS inférieur à 50, dont la Chine (49,3). Au Moyen-Orient, la situation est inégale, avec certains pays qui témoignent d’une forte vulnérabilité au risque social, comme l’Iran (28,7), alors que d’autres y semblent moins exposés, tel que le Qatar (66,9). Enfin, en Afrique et en Amérique Latine, un renforcement du risque social aurait de lourdes conséquences négatives sur le climat des affaires : la quasi-totalité des pays y obtiennent un mauvais score IRS.

En France, le risque social ne devrait pas mettre à mal le climat des affaires

Comme ses voisins européens et les autres économies avancées, l’économie française semble moins exposée à une perturbation du climat des affaires relative à une résurgence du risque social. Avec un score IRS de 74,2, la France se hisse à la 9ème place du classement. Une évaluation qui pourrait paraitre surprenante étant donné les importants mouvements sociaux qui ont secoué la France en 2018 et 2019. Comment expliquer ce paradoxe ?

« L’IRS n’a pas pour vocation à anticiper les crises sociales, mais il mesure les vulnérabilités structurelles de chaque pays au risque social. En France, les mouvements sociaux de 2018-2019 témoignent du mécontentement d’une partie de la population envers les actions menées par le gouvernement en place. Or la perception de cette politique ne concerne qu’un seul des 12 sous-indicateurs de l’IRS. Sur les autres composantes de l’indice, la France obtient de très bonnes notes, notamment en matière de dépenses publiques et de couverture sociale de la population. Nous estimons d’autre part que les récents ajustements politiques, qui font suite au mouvement des gilets jaunes et à la crise du Covid-19, ne mettront pas à mal la viabilité et l’attractivité du modèle économique français », explique Alexis Garatti, Directeur de la recherche économique d’Euler Hermes.

L’épidémie Covid-19, source supplémentaire de risque social en 2020 et 2021 ?

L’année 2019 a été le théâtre d’une forte résurgence du risque social dans de nombreux pays, que ce soit en Asie, en Amérique Latine ou au Moyen-Orient. En 2020 et en 2021, cette tendance devrait malheureusement se poursuivre, en grande partie à cause de l’épidémie Covid-19, et ainsi affecter le climat des affaires de nombreux pays.

« Avec les mesures de confinement, les mouvements sociaux se sont logiquement atténués. Mais l’épidémie Covid-19 a selon nous accru les inégalités sociales. L’impact financier est très négatif pour de nombreux ménages et entreprises dans le monde, ce qui pourrait aboutir à une nouvelle vague de mécontentements sociaux. On peut donc craindre un renforcement significatif du risque social dans beaucoup de pays cette année, notamment dans ceux où le risque était structurellement élevé avant la crise du Covid-19. C’est par exemple le cas de plusieurs pays en Amérique Latine, en Afrique et au Moyen-Orient », analyse Ana Boata, Directrice de la recherche macroéconomique d’Euler Hermes.